Vers un curriculum en information-documentation - Chapitre 10
Évaluation : des contenus pédagogiques au tronc commun
[2e édition le 17/12/2015] Pour faire suite aux chapitres consacrés à la dimension temporelle des apprentissages, selon les propositions 6 et 10 du GRCDI, qui introduisent la progressivité des apprentissages et l’articulation avec les autres domaines d’enseignement, penchons-nous désormais sur la question de l’évaluation, essentielle dans l’acte d’enseigner, sujet de la proposition 11 du GRCDI. L’évaluation caractérise une compétence professionnelle spécifique qui renvoie à une matière « disciplinaire » propre à chaque enseignant. Elle est sa marque, qui permet aux élèves de se situer et de progresser.
L’évaluation est un sujet complexe pour les professeurs documentalistes. Beaucoup d’entre eux écartent l’idée de la notation, ce qui peut occasionner une difficulté pour suivre la progression de chaque élève en information-documentation. Le mode d’évaluation du Socle commun de 2006 a été reçu favorablement par de nombreux collègues, pour la lisibilité qu’il donnait aux élèves, aux équipes pédagogiques et aux parents, dans le suivi de l’acquisition des connaissances et compétences. Cet outil permettait une intégration évidente des professeurs documentalistes, selon les items proposés, malgré les difficultés locales à faire reconnaître des compétences professionnelles dans le domaine pédagogique, et donc en matière d’évaluation. Parfois, il s’agit simplement de difficultés à faire apparaître le professeur documentaliste au sein du groupe de l’équipe pédagogique enregistrée dans l’outil informatique employé pour la formalisation de cette évaluation. Toutefois, construit à partir de programmes existants et axé essentiellement sur des compétences procédurales en termes d’information-documentation, ce mode d’évaluation souffre de plusieurs défauts, qui peuvent être dépassés grâce au curriculum.
Celui-ci présente une approche systémique préférable aux référentiels, centrés sur la dimension procédurale de la compétence, dans la mesure où le curriculum réintroduit la part d’intelligibilité qui rend possible une distanciation critique et éthique face à l’information et aux médias. C’est un enjeu capital, puisqu’il s’agit de donner aux élèves l’intelligence des outils en évitant que, dans une inversion de la place du sujet et de l’objet agissant, ils ne soient manipulés par des dispositifs sur lesquels ils pensent avoir la main.
Ces premières considérations nous rappellent à quel point l’évaluation dépend des moyens pédagogiques mis en œuvre par l’enseignant, sans mode unique d’évaluation. Selon la temporalité des apprentissages, à brève ou longue échéance, le travail d’évaluation ne peut sans doute pas souffrir de simplifications théoriques et de débats stériles autour de la note ou de l’absence de note. Sans préciser ici en détail les différentes méthodes pédagogiques dont dispose le professeur documentaliste pour développer ces apprentissages en information-documentation, nous prenons soin de cerner les liens complexes entre méthodes pédagogiques et évaluation. Nous ferons ensuite le point sur quelques modes d’évaluation qui, s’ils ne sont pas nouveaux, en particulier dans les pratiques des professeurs documentalistes, peuvent paraître encore aujourd’hui comme porteurs d’innovation pédagogique. Il nous faudra enfin rapporter ces considérations à la mise en place de nouveaux outils d’évaluation, cette fois-ci communs, déployés au niveau national, dans le cadre d’un tronc commun. Celui-ci part des connaissances et compétences ciblées dans les programmes, réunies sous le terme de savoirs.
L’évaluation comme partie essentielle de la méthode
L’évaluation est multiple, et participe directement des méthodes pédagogiques mises en œuvre, ainsi des méthodes expositive, active et interrogative, sur lesquelles Pascal Duplessis a proposé un article éclairant pour l’information-documentation, en mai 2014 [1]. L’évaluation sommative est certes importante, mais l’information-documentation, dans le cadre d’une pédagogie de projet, s’appuie davantage sur des évaluations diagnostique, formatrice et formative qui permettent de mesurer la progression de l’élève, pour l’enseignant, mais aussi pour l’élève.
Dans ce contexte, les évaluations formatrice et formative apportent une complémentarité qui doit permettre aux élèves de s’impliquer en participant à l’élaboration des critères attendus dans la réalisation du travail, tout en rappelant l’apport essentiel de l’évaluation, en terme d’attendus et de remédiation, par le professeur. L’évaluation peut avoir pour but de vérifier que le savoir transmis à l’élève ne soit pas déformé. Elle est alors traditionnellement sommative, par rapport à une méthode pédagogique expositive, dite aussi « magistrale », avec des interrogations écrites et des exercices d’application qui font suite aux apprentissages ou enseignements. Dans ce deuxième cas, le recours à une évaluation formative peut être préféré, bien que ce type d’évaluation soit davantage associée aux méthodes pédagogiques actives. L’évaluation formative vise le contrôle de la structuration des connaissances de l’élève, d’une part au sein même d’un projet pédagogique, avec un accompagnement qui suit la mise en place de l’activité, d’autre part à travers la progression de plusieurs projets, avec un outil lisible de progressivité pour l’élève, en termes d’évaluation des connaissances et des compétences. La méthode interrogative, un entre-deux, suppose là encore une structuration des connaissances de l’élève, non pas en activité, mais en interaction du groupe d’apprenants avec l’enseignant. L’évaluation est progressive, à la fois diagnostique et formative, relative aux difficultés rencontrées, qui implique de l’enseignant qu’il réajuste continuellement son cours selon la teneur des échanges avec les élèves.
Quelle que soit la forme de l’évaluation, il apparaît clairement que la mission pédagogique du professeur documentaliste ne peut se limiter à un état observé à un temps T, mais qu’elle doit pouvoir s’effectuer dans la continuité. Le suivi dans l’acquisition des compétences par l’élève intègre une progressivité relative à des savoirs complexifiés selon le niveau scolaire, avec des attentes accrues. Il en est de même dans l’accès progressif à l’autonomie. Les apprentissages en information-documentation supposent une observation de la progression de l’élève. Ce cadre peut constituer une difficulté concrète, dans la mesure où elle suppose une évaluation sur le temps moyen ou le temps long. Dans le contexte actuel où les apprentissages sont parfois limités sur un niveau (en sixième particulièrement), ou alors dispensés sur tous les niveaux mais avec un nombre d’heures limitées, l’évaluation perd en lisibilité de par la discontinuité des apprentissages.
Une autre difficulté se rapporte aux attitudes, terme complexe que nous n’avons pas retenu dans nos propositions concrètes de programmes, tandis qu’il apparaît à côté des capacités dans le PACIFI, en 2010 [2]. La question des attitudes, qui relèvent de considérations comportementales et morales, posent en effet question, relativement à la démarche de l’enseignant vis-à-vis de ces objets d’enseignement. Si ceux-ci évoluent plus vite que dans d’autres domaines d’enseignement, notamment lorsqu’ils se réfèrent au numérique, les savoirs de l’information-documentation doivent être interrogés pour leur problématique, en particulier par rapport à des attentes parfois ambiguës de la part de la société civile. Dans l’évaluation, comme dans les objectifs définis sur ces objets, à partir des connaissances et compétences à développer, il convient sans doute de clarifier certaines perspectives qui, là encore, si elles ne sont pas nouvelles, méritent une redite théorique tant les obstacles à la réflexivité peuvent être solides. Au-delà de l’expression reçue du développement de l’esprit critique des élèves, il peut s’agir par exemple, au sujet des usages numériques, non pas d’apprendre à faire attention, mais d’apprendre à être attentif. Il ne s’agit peut-être pas de développer des réflexes de réaction, mais d’apprendre à être réactif devant l’information, quelle que soit la forme qu’elle prend ; de dépasser en quelque sorte la tension entre technophobie et technophilie. Ces apprentissages en information-documentation participent d’une « écologie de l’attention », pour reprendre le propos d’Yves Citton [3], qui reprend l’un des enjeux mis en avant par Nicholas Carr [4], pour « aménager notre environnement [informationnel, ajoutons-nous sans dénaturer le propos] de façon à y protéger des expériences de profondeur », pour un « spectateur émancipé », si l’on reprend cette fois l’expression de Jacques Rancière [5].
Qu’en est-il de l’évaluation sommative, de la note qui, pour certains, participent de l’identification de l’éducateur comme professeur ? Qui peut être sujet de lutte locale importante pour les professeurs documentalistes qui estiment voir ainsi reconnu leur enseignement ? Quand on s’intéresse davantage à cette dernière question, on observe sans doute que la lutte concerne surtout l’intégration de l’évaluation dans le bulletin « de notes », avec le souhait d’une ligne pour l’appréciation, mais sans qu’il y ait toujours de note. Cette volonté suppose une visibilité distincte de celle des autres domaines d’enseignement, avec un regard marginal dans l’instance-reine, le conseil de classes, tant une appréciation est surtout regardée en réponse à une note problématique ou accidentelle, plutôt qu’en elle-même.
Cette considération en rejoint une autre, celle de la lisibilité nécessaire de l’évaluation, de l’initiation d’un projet à la communication extérieure sur les acquisitions de l’élève, auprès de l’équipe éducative et des parents, en passant bien sûr par la lecture critique de l’évaluation par l’élève lui-même. Il ne doit pas s’agir d’une information, mais d’une lecture critique qui permette, au cœur du projet et dans la progression annuelle ou pluriannuelle, de comprendre les objectifs d’une activité et d’un apprentissage. Il en va aussi de la lecture des points positifs et négatifs des remarques formulées dans l’évaluation, qu’elles prennent consistance dans l’accompagnement dit informel (qui l’est surtout pour l’élève, plus que pour l’enseignant) ou dans la « sanction » certificative, lors d’évaluations sommatives ou dans le cadre d’une évaluation formative qui suppose des bilans réguliers, trimestriels ou annuels dans le cadre scolaire actuel. Cette lisibilité suppose une explicitation des notions développées et des objectifs pédagogiques dans la conception même d’une séance ou d’une séquence pédagogique. La formalisation stricte de ces notions et objectifs est un préalable à la réflexion sur le déroulé de l’activité pédagogique, avec la possibilité de recourir à des tableaux-types.
- Formalisation de l’activité pédagogique - Tableau-type
[Cliquez pour télécharger le document intégral en PDF]
Le portfolio, le document de collecte et les TPE
Les méthodes induisent l’évaluation, avec la conception d’outils plus ou moins élaborés. Les professeurs documentalistes prennent appui déjà dans leurs pratiques sur des supports, méthodes et/ou dispositifs particulièrement riches au regard des réflexions proposées à ce sujet.
**1. Le portfolio
Mis en avant depuis plusieurs années, le principe du portfolio, qu’il soit imprimé ou numérique, peut être un exemple intéressant d’évaluation intelligente des élèves. En effet, la production et la conservation de traces de travail, qui supposent un retour postérieur sur ces éléments, peut favoriser, pour l’élève et pour les parents, mais aussi bien sûr pour les enseignants, un moyen d’apprécier l’évolution ou le développement des compétences et des connaissances [6].
Dans le cadre d’une collaboration, par exemple dans le dispositif d’Histoire des Arts, il s’agit d’accompagner le travail sur les œuvres, avec les étapes de recherche relatives, selon le niveau des élèves, au besoin d’information, au questionnement, à la recherche des informations et à la production de réponses ou d’une synthèse.
Dans le cadre d’une activité de recherche propre à l’information-documentation, on peut penser une progression des recherches, par exemple sur l’objet « réseaux sociaux numériques ». En classe de cinquième, les élèves sont ainsi amenés à répondre à des questions relatives à un exemple de réseau social, individuellement ou en binôme, au sujet de l’identité et de l’utilité du réseau, au sujet de son modèle économique, au sujet de son éthique, en termes d’avantages et d’inconvénients à l’utilisation du réseau. L’évaluation peut être effectuée par des pairs, avec un échange des sujets, et le travail aboutir à une production finale qui soit publiée. De même, on peut penser de nouveau la recherche en classe de troisième, en se référant, avec le portfolio, aux recherches effectuées deux ans auparavant, d’une part afin de définir un besoin d’information plus important, d’autre part afin de lire la progression des apprentissages, et enfin de développer des connaissances en comparaison des deux documents produits par l’élève.
Le portfolio permet en outre de faire référence, pour l’élève et pour l’enseignant, à une grille d’évaluation par compétences et connaissances, si ce type d’évaluation est toujours considéré comme pertinent par le Conseil supérieur des programmes.
**2. Le document de collecte
Plus spécifique à un travail de recherche d’information et d’exploitation de l’information, le document de collecte apparaît comme le moyen d’une évaluation et d’une appropriation de l’information par l’élève, mais aussi comme un mode d’évaluation en cours d’activité [7]. A l’instar du portfolio, mais dans le cadre d’une activité pédagogique ponctuelle (qui peut être intégrée dans le portfolio), le document de collecte, manuscrit ou numérique, est un moyen de garder des traces du processus de recherche et d’exploitation de l’information. C’est donc une possibilité pour l’enseignant et pour l’élève d’évaluer les différentes étapes, et donc bien la maîtrise des savoirs et savoir-faire définis comme objectifs de la séquence ou du projet, plutôt que la seule finalité, laquelle ne permet pas, bien souvent, de mesurer les différents savoirs visés.
**3. Le carnet de bord
Dernier exemple, particulier au projet sur le temps moyen que sont les TPE, ou travaux personnels encadrés, le carnet de bord a été étudié par Anne Cordier et Vincent Liquète, enseignants chercheurs en Sciences de l’information et de la communication [8].
Quand le portfolio relève d’un souci de garder les traces d’une progression globale en information-documentation, le carnet de bord des TPE est une exigence officielle du dispositif. Il est intéressant d’observer avec les chercheurs, afin de réfléchir également au développement du porfolio et du document de collecte, que cet outil de travail n’est pas un outil d’usage évident pour les élèves, et qu’il est surtout considéré comme un moyen d’évaluer leur travail, pour le professeur plutôt que pour les élèves eux-mêmes. Pour autant, cet outil peut participer d’une évaluation formative essentielle, que l’on peut aussi appliquer pour des dispositifs de collège, dans le cadre de projets menés à l’année sur un thème précis (les médias d’actualité, les médias sociaux) ou dans le cadre du dispositif de l’Histoire des Arts, par exemple. Une évaluation par le carnet de bord permet de mieux mesurer les acquisitions des élèves, au-delà d’une évaluation sommative qui passe en effet à côté de l’essentiel des démarches intellectuelles effectuées.
Les savoirs évalués dans une progression, en activité
Si l’on reprend l’ensemble des vingt savoirs attendus en fin de sixième, selon les recommandations proposées dans le chapitre 8, on constate que ces modes d’évaluation en activité permettent d’évaluer les savoirs suivants, de manière évidente, tout en participant de l’acquisition des autres compétences :
identifier l’auteur et l’éditeur d’un ouvrage ;
identifier l’auteur d’un article de périodique, d’une page web ;
définir les mots-clés utiles à une recherche ;
savoir utiliser les outils de recherche (index et sommaire d’un livre documentaire, barre de recherche d’un moteur de recherche) ;
utiliser la navigation arborescente et hypertextuelle pour rechercher des informations ;
évaluer la pertinence d’un document lors d’une recherche ;
évaluer la fiabilité d’une information lors d’une recherche, à partir de critères simples.
Sept savoirs sur vingt sont ici concernés, clairement, sans que les autres ne soient exclus de ces modes d’évaluation en formation.
Pour l’issue de l’année de troisième, les savoirs suivants sont ainsi ciblés :
comprendre le fonctionnement d’une base de données, en tant qu’outil permettant l’enregistrement et l’accès à l’information ;
commencer à maîtriser son environnement informationnel et son évolution, avec la connaissance de ressources de référence (numériques, imprimées) ;
définir le ou les types de document à consulter selon le besoin d’information ;
identifier et reporter les références d’un document (auteur, titre, édition, collection, date de publication, nombre de pages, URL...) ;
connaître des exemples d’éditeurs et de collections ;
définir les mots clés utiles à une recherche et modifier sa recherche selon les résultats et le besoin d’information (initial et nouveau) ;
savoir utiliser le catalogue du CDI ;
comprendre les principes intellectuels de la classification et du référencement ;
comprendre le lien entre une base de données et un outil de recherche ;
connaître plusieurs outils de recherche et leur fonctionnement ;
définir son besoin d’information ;
choisir un outil de recherche selon la définition du besoin d’information ;
connaître le principe de la veille informationnelle et de son fonctionnement ;
évaluer ou réévaluer la pertinence d’un document lors d’une recherche ;
évaluer la fiabilité d’une information lors d’une recherche, à partir de critères simples ;
collecter les informations à partir d’un document selon un besoin d’information ;
réaliser une production documentaire (exposé, dossier...) à partir d’une recherche d’information, en citant les sources ;
choisir le mode de publication adapté à la communication de l’information produite ;
comprendre le rôle de la médiatisation d’une information dans la construction d’une culture informationnelle, faire le lien entre médiatisation et critères d’évaluation de l’information ;
connaître les règles de droit concernant le droit de propriété intellectuelle et de droit à l’image ;
connaître ses droits et devoirs, en tant qu’usager des médias sociaux en ligne et des outils de publication numériques, en relation avec la législation en vigueur.
Cela porte à 21 sur 27 le nombre de savoirs attendus pour la fin de l’année de troisième, ce qui démontre tout l’intérêt de la mise en place d’un portfolio au collège. Les six savoirs restants peuvent évidemment être évalués dans une démarche d’évaluation formative :
faire le lien entre l’instabilité documentaire et la conception des documents numériques (en lien avec des connaissances, par exemple, sur les bases de données) ;
connaître plusieurs médias et les bases de leur modèle économique ;
connaître différents types d’information ;
connaître les principaux médias sociaux en ligne et leur modèle économique, cerner l’évolution récente des médias sociaux ;
connaître les bases de l’économie de l’information associée à l’Internet, et en particulier celles des médias sociaux en ligne (publicité, publicité ciblée) ;
faire le lien entre l’économie de l’information et les enjeux relatifs à la présence numérique et à la construction d’une identité numérique ;
connaître les questions morales et légales, de manière simple, posées par le développement des bases de données et par l’ensemble des solutions de stockage de données informationnelles sur des serveurs distants.
L’énumération de tous ces savoirs conduit à rappeler qu’ils sont partie intégrante d’un curriculum, sous forme de recommandations, et qu’ils ne peuvent être listées auprès de l’élève, quand bien même ils doivent être lisibles pour la société civile. En effet, en réclamant l’obtention de chaque savoir, de manière très formelle, on renvoie une complexité du curriculum difficile à assimiler pour les élèves, de même qu’on renvoie à une tendance fâcheuse à la mesure permanente des acquis, démarche qui n’est pas si pertinente pour favoriser les apprentissages, quand bien même on dépasse le souci abusif d’une quantification trop fréquente, par exemple existante dans la notation.
Le rappel du format de recommandations conduit à préciser que c’est à l’enseignant, en fonction de son public et selon la progression et les objets d’enseignement définis dans le curriculum, de trouver librement le mode de communication auprès des élèves, en considération de leur niveau et du contexte de l’établissement, sans solution unique. Il ne s’agit pas forcément de réduire l’explicitation aux quatre champs, non plus qu’aux sept notions organisatrices, mais de trouver un équilibre entre ces éléments organisateurs, qui peuvent évoluer, et les savoirs précisés, qui peuvent être regroupés de manières différentes selon la teneur du projet pédagogique mis en œuvre et selon la collaboration trouvée avec un enseignant d’un autre domaine d’enseignement.
Par ailleurs, l’enseignant documentaliste peut disposer d’outils d’évaluation, qui lui permettent de cerner, pour lui, les acquis progressifs des élèves en termes de capacités, en lien avec les objectifs formalisés auprès des élèves afin qu’ils perçoivent leur progression, leurs forces et leurs faiblesses, selon les modalités définies par l’enseignant.
Conclusion : des savoirs spécifiques au Socle commun « évalué »
Dans sa nouvelle construction, le « Socle commun de connaissances, de compétences et de culture » permet de cerner les exigences que l’on peut formaliser pour les élèves à l’issue de chaque cycle d’apprentissages. Le Conseil supérieur des programmes organise ainsi quatre groupes chargés de l’élaboration des programmes pour la maternelle et pour chaque cycle 2, 3 et 4. Notre volonté de curriculum rejoint les principes énoncés dans la charte des programmes, avec une logique intellectuelle partagée. Dans ce cadre, à partir des réflexions développées dans cette construction de curriculum, il est possible de revenir sur l’importance de l’évaluation dans le projet de Socle commun, afin d’inverser maintenant la démarche, partant des connaissances et compétences intégrées dans la proposition de programme, sous forme de savoirs.
L’évaluation participe de la méthode, et suppose une explicitation pour les élèves, on l’a dit. Cette explicitation passe par un affichage des critères d’évaluation et des savoirs évalués, lors d’un projet, mais encore par un outil relatif à la progression, qui ne soit pas une succession de notes, pour une moyenne, mais un module de validation qui réponde à une complexification progressive, ou progression spiralaire, dans l’acquisition des savoirs. Se pose enfin la question d’une concordance entre l’outil local d’évaluation, propre à l’enseignant et aux élèves, et l’outil national relatif à la définition des exigences du Socle commun.
On peut estimer que l’ensemble des savoirs présentés, s’il peut être lisible par les élèves, dans les pratiques pédagogiques, le sont moins par les parents, avec une progression de 20 à 30 savoirs par niveau. Cela peut donc supposer un effort de simplification, non pas dans l’évaluation proprement dite, mais dans la synthèse de cette évaluation.
Notes
[1] DUPLESSIS Pascal. Les méthodes pédagogiques en information-documentation. In Les Trois Couronnes (Didactique de l’information-documentation et identité professionnelle de l’enseignant documentaliste. Site de Pascal Duplessis) [en ligne], 05/2014. Disponible sur : http://lestroiscouronnes.esmeree.fr/outils/les-methodes-pedagogiques-en-information-documentation
[2] Disponible sur : http://media.eduscol.education.fr/file/Pacifi/85/4/Reperes_Pacifi_157854.pdf
[3] CITTON Yves. Pour une écologie de l’attention. Paris : Le seuil, 2014, 312 p.
[4] CARR Nicholas. Internet rend-il bête ? Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté [The Shallows]. Paris : Laffont, 2011, 312 p.
[5] RANCIERE Jacques. Le spectateur émancipé. Paris : La fabrique, 2008
[6] Au sujet du portfolio, on peut consulter les travaux d’Agnès Montaigne, en particulier MONTAIGNE Agnès. Enseigner la recherche d’information. Progression, traces et évaluations dans un curriculum info-documentaire. In Médiadoc, juin 2013, n° 10. Disponible sur : http://www.apden.org/Enseigner-la-recherche-d.html
[7] Voir Le document de collecte : quand la recherche documentaire devient écriture, mémoire et partage. In Doc pour docs [en ligne], 08/04/2014. Disponible sur : http://www.docpourdocs.fr/spip.php?article539
[8] CORDIER Anne. LIQUÈTE Vincent. La translittératie, un facteur de réagencement de l’organisation scolaire ? [In 19ème Colloque Bilatéral Franco-Roumain en Sciences de l’Information et de la Communication, Mars 2013], In Romania, p. 8-12 Disponible en ligne sur : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_01066402/document