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Documentalistes bibliothécaires 1974-1976 : premier projet de statut

Article publié dans le Mediadoc N°2 Avril 2009

Chronique

par Françoise Chapron

La priorité de la FADBEN, dès 1973 est d’être la voix des documentalistes bibliothécaires issus de statuts et de corps très hétérogènes affectés par des procédures de recrutements variées depuis la création des bibliothèques et des services documentaires.

Les SDI (services de documentation et d’information) se sont développés au delà des grands lycées de la région parisienne en province et on commence à en implanter dans les gros collèges. Pour autant, leurs configurations, leurs fonctionnement, leurs moyens, les conditions de travail et les activités de leurs responsables sont pour le moins hétérogènes, sinon hétéroclites d’autant que la formation initiale est indigente (une semaine en CRDP et deux semaines de stage en collège et lycée).

De plus en plus de collègues, jeunes maîtres auxiliaires ou adjoints d’enseignement (titularisés avec une licence mais sans un CAPES),
n’ayant plus d’affectation dans leur discipline d’origine sont nommés en SDI. Au contraire d’autres qui fuient l’enseignement, la majorité de ceux-ci souhaite continuer à exercer une fonction pédagogique dans un autre cadre, dont ils perçoivent à travers les expérimentations du Travail autonome et leurs initiatives locales, tout l’intérêt pour la rénovation des méthodes pédagogiques et la motivation des élèves, surtout après la rupture culturelle et éducative de mai 1968.

Quelques responsables institutionnels comme l’Inspecteur général Marcel Sire, qui en a été un des premiers défenseurs, ou Georges Tallon, son successeur qui a cordonné deux rapports en 1973 et 1974, insistent sur la nécessité de concevoir un statut spécifique et cohérent pour leurs personnels. Une première tentative de statut a échoué au moment de la parution en 1970 du celui des nouveaux conseillers d’éducation. Le mandat prioritaire de la FADBEN naissante est de défendre aussi la revendication d’un statut et la reconnaissance de la fonction pédagogique des CDI et des documentalistes.

L’année 1974 connaît un changement de septennat et une certaine ouverture marquée notamment par l’action de Joseph Fontanet qui
introduit les 10%, partie de l’horaire hebdomadaire des élèves qui peut être consacrée à des activités pédagogiques, éducatives et culturelles non strictement dépendantes des programmes. A l’automne 1974, à la suite du rapport Tallon, dont il rédige une note de synthèse
proposant sept fonctions pour les CDI, un groupe de travail est mis en place par la Direction des Personnels Enseignants. Y sont conviés des représentants des syndicats représentatifs des personnels du second degré SNES, SGEN, SNALC, CNGA1 et la FADBEN, jeune association professionnelle représentative, officiellement reconnue ainsi par la présence de Claude Pequignot, Président et de Claude Fournier, un des deux vice présidents.

Durant presque deux ans, le groupe de travail ministériel dans lequel la FADBEN joue un rôle d’expert et de lien entre les responsables de syndicats qui communiquent pas ou peu entre eux et dont les délégués ne sont pas tous des documentalistes, se réunit assez régulièrement et même à une certaine période, toutes les semaines [1]...

La demande d’un statut de certifié est écartée d’emblée par l’administration et le groupe concentre de ce fait sa réflexion sur la conception d’un statut inspiré de celui des CE/CPE (conseillers et conseillers principaux d’éducation) [2].

On propose donc la création d’un corps de CD et CPD, Conseillers et Conseillers principaux d’éducation, certes aligné comme pour les Conseillers principaux sur les grilles des certifiés, mais sans le statut d’enseignant. Au cours de cette longue négociation s’esquisse, avec des avancées, des reculs, des compromis, la structuration du statut mais aussi les mesures d’intégration qui accompagnent toute
création d’un nouveau corps. L’échéancier et les pourcentages donnant lieu à des heurs de discussion, des remises en cause d’une
séance à l’autre, des reprises, liés aux rapports de forces en présence et aux contraintes posées par l’administration. C’est dans ce genre d’expérience que s’apprécie l’expression « combien de divisions ? » !

Au cours de la réflexion sur le statut, s’élabore aussi un texte de mission pour lequel vient siéger au sein du groupe, l’Inspecteur général Tallon dont la note de septembre 1974 présentée comme confidentielle alors qu’elle circule au sein de la profession, va constituer la base du texte paru en février 1977. Au bout de ce long processus, un accord se dessine. Il fait l’objet d’un « relevé de conclusions » signé par les organisations présentes, accompagné de leurs commentaires respectifs.

C’est ce texte qui figure, comme le projet de statut et le futur texte de mission, dans la plaquette « FADBEN Info » envoyée en décembre 1976 aux adhérents. Malgré ses imperfections soulignées, la profession, en attente forte d’un statut, est démoralisée lorsqu’en mars 1977, est connu le refus de la « rue de Rivoli », aujourd’hui « Bercy », du projet de statut dont les mesures sont jugées trop coûteuses. Pour autant, le ministère publie la circulaire 77-077 du 17 février 1977 sur « les tâches des responsables de CDI ».

Pour la première fois, on définit clairement les missions des CDI et on attribue à leurs responsables une fonction essentiellement pédagogique et une tâche d’enseignement aux élèves « des méthodes de recherche et de travail sur documents ».

Au bout du compte, malgré la déception compréhensible sur le moment et même s’il faudra attendre 1989 et la création du CAPES, l’échec du projet, qui écartait les documentalistes, dotés d’un statut comparable à celui des CPE ou des COP, du travail pédagogique direct avec les enseignants qu’ils revendiquaient, leur a sans doute évité de rester marginalisés officiellement dans des fonctions de gestion ou d’auxiliariat pédagogique. Forte de ce premier acquis, même si l’ambition de l’obtention initiale d’un statut n’a pas été remplie, la FADBEN, pleinement orientée vers la réflexion pédagogique, se saisit de ce texte pour « prouver le mouvement en marchant ».

La parution du Manifeste en 1978 en sera l’étape nouvelle.

Notes

[11 Confédération des groupements autonomes, de tendance
conservatrice, comme le SNALC, disparue depuis

[22 Travaillant aux côtés de Claude Fournier avant de rentrer au bureau national en octobre 1976, j’ai suivi toute la négociation en « différé »

Documents

Premier projet de statut
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