2015
oct.
10

Enseigner-apprendre l’information-documentation : regard sur l’international

Table ronde. Collectif

Magali BON, Martine ERNOULT, Valérie GLASS, Danielle MARTINOD.

Table ronde animée par Martine ERNOULT.

1. La FADBEN à l’international

Former les élèves aux compétences et savoirs de l’information et des médias est devenu aujourd’hui une question politique majeure reconnue par les instances internationales telles que l’UNESCO.

Une association professionnelle responsable a toujours le souci d’intégrer ses orientations nationales à la réflexion internationale sur le même cœur de métier ; le développement professionnel de ses adhérents s’en trouve naturellement enrichi.

C’est pourquoi la FADBEN participe depuis 1989, date de la création du Capes de documentation, à des activités à l’international.

S’engager à l’international : l’enjeu de notre lisibilité à l’étranger

Un des enjeux de la participation à des activités à l’international est avant tout notre lisibilité au-delà de l’Hexagone : quelle conception du métier partageons-nous avec nos collègues étrangers ? Comment travailler ensemble pour développer une expertise internationale et faire avancer la profession dans le monde ?

Plusieurs raisons sont au cœur de notre réflexion associative :

  • Penser l’avenir avec les autres : travailler ensemble pour développer une expertise internationale sur les questions qui traversent la profession.
  • Créer un réseau : se faire connaître en rencontrant d’autres acteurs directement (représentants d’associations professionnelles, d’institutions….).
  • Confronter réflexion et réalisation : le contexte international apporte un éclairage sur les évolutions conceptuelles de « l’éducation à l’information » et ses mises en pédagogie, dans le contexte de l’enseignement avec le rôle prééminent des bibliothèques scolaires.
  • Communiquer sur nos travaux, en optimiser la réflexion et les applications : depuis 1989, la FADBEN a toujours participé aux congrès de l’IFLA, plusieurs communications y ont été présentées dans différentes sections [1].
  • Favoriser des traits d’union dans les pratiques de nos professions respectives dans une logique de coopération européenne et internationale : l’actualisation des « Directives pour les bibliothèques scolaires » de l’IFLA/UNESCO s’avère être un document très fédérateur.

S’engager à l’international : quelles actions mettre en œuvre ?

Plusieurs moyens et actions sont à notre disposition :

Participer à des congrès professionnels :

En étant élus dans des sections thématiques, par des actions à distance, communications et traductions, ouvrages et actions de promotion.

La FADBEN adhère à l’IFLA (Fédération Internationale d’Associations de Bibliothèques) et y participe activement depuis 1989. Elle y parraine ses représentants élus dans les sections, actuellement il y a deux élues dans la section « School Libraries ». D’autres sections, « Enseignement et Formation » et « Bibliothèques et Services aux populations multiculturelles », ont eu des représentants FADBEN dans le passé.

Le travail en section permet une coordination à distance des projets mis en œuvre tout au long de l’année, avec une rencontre de mise au point organisée en milieu d’année.

Lors du congrès IFLA 2014 à Lyon, une communication intitulée « Le rôle du professeur documentaliste dans l’enseignement de l’information et des médias : les perspectives de la FADBEN » présentée en anglais, a permis de promouvoir la réflexion pédagogique de notre association. En 2015 au Cap (Afrique du Sud), une communication intitulée « Être professeur documentaliste en France : comment profiter du réseau des pairs pour développer ses compétences professionnelles », dans le cadre d’une conférence-satellite organisée par la section « Développement de la Formation continue et professionnelle », a mis en avant le rôle de la FADBEN dans la formation continue des professeurs documentalistes.

Des traductions de communications étrangères ont également été réalisées. Traduire, c’est participer à la diffusion de l’information essentielle aux collègues qui ne maîtrisent pas les langues étrangères, et permettre la compréhension de notions ou autres connaissances qui apparaissent ailleurs.

Les posters présentés en congrès sont un autre moyen de nous rendre visibles : cette communication visuelle permet d’atténuer les barrières linguistiques. Au congrès IFLA Lyon 2014 un poster intitulé « Pour un curriculum en information-documentation : de la maternelle à l’université » a retenu l’attention de plusieurs partenaires potentiels.

La FADBEN a également rencontré l’IASL (International Association of School Librarianship), l’Association internationale des Bibliothécaires scolaires. Elle tenait son congrès en 2015, à Maastricht. La « déléguée des relations internationales » au Bureau national y a assisté en présentant une communication et un poster. La communication était intitulée « To make every pupil stronger, a curriculum in information and documentation in every French CDI » (« Un curriculum en information-documentation dans chaque CDI français pour renforcer la formation des élèves ») et le poster présenté était le même que celui proposé à l’IFLA en 2014.

Enfin, la participation à des ouvrages est également vectrice de nos idées. Dans l’ouvrage Global Action on School Libraries Guidelines, livre en relation avec la mise à jour de l’IFLA/UNESCO School Library Guidelines, la FADBEN a rédigé un chapitre intitulé « Developing a curriculum in information and documentation for secondary schools in France » (« Pour un curriculum en information-documentation dans l’enseignement secondaire en France »).

Cet ouvrage rassemble des chapitres avec des exemples d’actions menées illustrant les différentes parties du « School Library Guidelines ». La promotion de ce livre a pu se faire lors des congrès IFLA au Cap en août 2015, et de l’IASL à Maastricht en juin 2015.

Enfin, lors du congrès IFLA Lyon 2014, des présentations du métier de professeur documentaliste ont été faites par des collègues congressistes, boursières du CFIBD, sur le stand « My French library » organisé par l’ENSSIB.

S’inscrire dans un réseau d’associations : CFIBD, AIFBD, ENSIL et IABD

Notre lisibilité à l’étranger passe également par l’inscription dans un réseau d’associations, notamment français et francophone. En s’efforçant de mutualiser informations, méthodes, stratégies pour les confronter aux enjeux et défis respectifs, les différentes associations apprennent à mieux se connaître et peuvent faire converger des problématiques voisines, sinon identiques, pour être mieux entendues des instances gouvernementales décisionnelles.

Tout d’abord, le CFIBD (Comité Français International Bibliothèques et Documentation), association à laquelle la FADBEN est adhérente, accorde un programme de bourses pour faciliter la participation à des congrès internationaux (IFLA, LIBER, EBLIDA). C’est le CFIBD qui a soutenu la candidature de Lyon pour IFLA 2014 et qui l’a organisée.

L’AIFBD (Association Internationale Francophone des Bibliothécaires et Documentalistes) regroupe des professionnels qui ont en commun l’usage de la langue française. Ses membres développent une coopération en bibliothéconomie, en documentation et en sciences de l’information et se rapprochent de tout organisme international poursuivant des objectifs semblables ou proches des siens, ainsi qu’avec toute association de même nature en activité, au sein des différents pays francophones. A ce titre, la FADBEN peut travailler avec des bibliothécaires scolaires des pays francophones.

L’ENSIL (European Network of School Information Literacy) regroupe des participants européens, et a pour but la promotion de la bibliothéconomie scolaire, de la formation professionnelle, et l’échange d’informations.

L’IABD (Inter-Association Bibliothèques et Documentation) peut aider à signer des collaborations possibles par l’intermédiaire des commissions conjointes de l’IFLA. Cette inter-association, regroupant différentes associations de bibliothèques, travaille sur des questions partagées par l’ensemble de la profession, telles que le droit d’auteur, de copie, l’EMI…

S’engager à l’international : quelles perspectives ?

S’engager à l’international reste un travail sur le long terme, mais dans un futur immédiat, une ingénierie de la communication s’impose. Nous devons continuer à entretenir des liens avec les collègues rencontrés à l’étranger, encourager le militantisme de nos linguistes, pour exister dans un réseau associatif dynamique et ouvert.

A l’IFLA, le travail amorcé dans la section « School Libraries » exigera une continuité participative développée à partir de la volonté et l’engagement personnel, comme dans d’autres sections, d’ailleurs. Le « Rapport des Tendances », diffusé chaque année, peut permettre de dégager une vision prospective du métier, ouvert sur les comparaisons internationales.

Les listes de diffusion [2], les réseaux sociaux animés par des acteurs motivés, les réponses à des appels à communication, les posters, sont des outils adéquats.

Après notre « Manifeste 2012 », qui sollicitait, en français comme en anglais, une mobilisation convergente autour des problématiques d’éducation à l’information, après les avancées du Congrès IFLA Lyon 2014, qui a révisé complètement les « Orientations stratégiques pour les bibliothèques scolaires » de l’UNESCO 2002, suivie de « La Déclaration de Lyon » pointant pour l’ONU, le rôle de l’information comme facteur de développement, y intégrant des aides structurelles pour sa compréhension dès le plus jeune âge, nous sommes en droit d’imaginer que toute action tangible renforce la réflexion collective ; la mise en œuvre opérationnelle d’une réelle formation à la culture de l’information pour tous ne peut que s’en trouver facilitée, ici et maintenant.

2. Le cadre de réflexion actuel

Un nouveau cadre de réflexion à l’international (IFLA, IASL réseau ENIL)

Depuis quelques années nous percevons, dans le monde des professionnels des bibliothèques, de la documentation et des archives, une modification de leurs prérogatives, allant vers un élargissement de leurs compétences. Le paysage informationnel change dans un monde où les sources d’information se multiplient et où l’environnement informationnel se complexifie.

La déclaration de Lyon IFLA 2015 [3] pointe le rôle de l’information comme facteur de développement. Elle intègre, après la réflexion sur les accès, le partage et le flux, la problématique de la compréhension de l’information, qui devient un enjeu pour améliorer la vie des populations. Cette déclaration précise le sens donné à l’« accès à l’information », intégrant l’accès, la maîtrise de l’information et son appropriation, ainsi que désormais sa compréhension.

Dire de la compréhension de l’information qu’il s’agit d’un nouveau paradigme serait abusif, il s’inscrit dans un continuum, dans une histoire longue. Il vient compléter l’ancienne approche, plus attachée à la méthodologie documentaire et à la maîtrise de l’information, qu’il intègre, donnant à la dimension culturelle plus d’envergure. Ainsi, l’efficacité, qui était auparavant la seule compétence recherchée, s’enrichit de la compréhension des principes et des enjeux de la culture informationnelle.

L’ajout de la compréhension de l’information, dans un texte de cadrage politique proposé par les acteurs, les associations professionnelles, se traduit par un changement d’approche dans l’histoire de la formation à l’information dans le monde des professionnels des bibliothèques et de la documentation.

Vers une reformulation de la problématique de la formation à l’information

Nous nous proposons de rappeler quelques périodes-clé à même de suivre les évolutions en cours :

Éducation à l’information (Information literacy)

Le terme apparaît dans les années 70-80. Ce courant est très critiqué en France car trop connoté par son approche économique des bibliothèques.

L’expression marquée par le terme de maîtrise de l’information est utilisée dans l’enseignement supérieur en France. En revanche, elle est critiquée par les professeurs documentalistes de l’enseignement secondaire ; la pédagogie de la maîtrise développée dans un contexte béhavioriste garde un côté mécaniste, laissant peu de place à la réflexion personnelle et à la créativité.

Culture de l’information (1989)

La définition donnée par l’ALA (American Library Association) se résumerait ainsi : « Il faut former à l’information pour former à la société de l’information ».

La culture de l’information - et sa maîtrise - devient l’une des cinq habiletés essentielles pour pouvoir intégrer le marché du travail. Elle est assimilée à la formation tout au long de la vie et est considérée comme l’un des nouveaux droits humains de base dans la société numérique.

1989 marque la première participation à l’international de la FADBEN au congrès IFLA de Paris. Vingt-cinq ans d’une réflexion commune, partagée par la FADBEN à quelques nuances près. Car en France, dans les années 2000, l’hypothèse de départ est plutôt « pas de société d’information sans culture informationnelle [4]. »

Si l’accès à l’information a longtemps été une préoccupation dominante, cette problématique s’est déplacée vers une nécessité de penser l’information. Le XXIe siècle s’est ouvert sur une réflexion élargie. La notion de « formation à l’information » est prise en compte différemment selon les pays européens, avec des conceptions opposées ou, à l’inverse, parfois approchantes.

Carla BASILI, Information Literacy in Europe [5] : « la pratique documentaire ne relève pas d’une technologie ou d’une méthodologie : elle participe directement de l’acquisition des savoirs et, à ce titre, ne saurait être dissociée des disciplines… À l’heure où les établissements s’engagent dans une réflexion importante sur la pédagogie universitaire, et qu’émergent de nouveaux modèles et de nouveaux lieux d’apprentissage dans lesquels les bibliothécaires entendent trouver leur place, l’ADBU a souhaité s’interroger sur la rôle possible de la documentation dans les nouveaux processus d’apprentissage à l’université. »

De l’éducation à l’information (l’information literacy) à la culture de l’information, à la culture informationnelle

Le temps des convergences

En 2014 en France, on assiste à un rapprochement, à une convergence des préoccupations dans les bibliothèques, médiathèques, avec par exemple des services de formation des utilisateurs, une problématique qui traverse l’ensemble des entités.
La réactualisation du concept de « culture de l’information », issu du monde des bibliothèques et des centres de documentation, est essentielle.

Les associations professionnelles accompagnent la Déclaration de Lyon et l’ancrent dans leurs préoccupations actuelles, changement de paradigme déjà intégré par un très grand nombre de professeurs documentalistes.

Lors de l’enquête réalisée par la FADBEN en 2013, les résultats ont montré l’attachement au rôle d’enseignant, pointant l’investissement dans les dispositifs institutionnels, mais aussi les difficultés dans la mise en œuvre [6].

La participation de la FADBEN à l’inter-association IADB, elle-même présente à l’international, est importante, elle permet de se tourner à plusieurs vers les politiques, les institutions du monde de la culture et de l’éducation… pour interroger leurs actions.

Le temps des convergences est aussi celui où confluent des quatre coins du monde les expériences des acteurs du domaine. En France par exemple, l’absence d’évaluation nationale qui rende compte des compétences et des connaissances acquises dans le domaine de l’information-documentation a conduit la FADBEN à réaliser une enquête diagnostique entre 2011 et 2013 sur plus de 9000 élèves du secondaire, consultable en ligne [7].

La conclusion est une illustration des propos que la FADBEN porte à l’international dans le secteur des « bibliothèques en milieu scolaire » : « Les constats relevés par cette enquête, s’ils révèlent in fine les limites des "formations" info-documentaires basées sur l’aléatoire, la discontinuité des apprentissages, l’inégalité de leur accès et l’absence d’un programme d’enseignement spécifique, ne doivent pas être considérés comme une fatalité, le fruit d’un expédient ou d’un compromis bancal, faute de mieux. Ils doivent au contraire inciter la profession, et ses partenaires, chercheurs et institutionnels, à construire avec encore plus d’empressement et de fermeté son expertise didactique et pédagogique, non seulement parce qu’aujourd’hui les connaissances scientifiques et épistémologiques de ces nouveaux savoirs scolaires sont disponibles et attendent la systématisation de leur transposition didactique, mais aussi et surtout parce que demain, les élèves sortant du système éducatif en auront plus que jamais besoin pour leur devenir personnel, professionnel et citoyen ».

En France, dans le cadre associatif, former, enseigner-apprendre en tant que processus interactif, est aujourd’hui la préoccupation des professeurs documentalistes ou « bibliothécaires en milieu scolaire » appellation retenue à l’international. La FADBEN porte à l’international la réflexion curriculaire [8] dans le domaine de l’information-documentation.

En conclusion de ces rappels historiques, on pointera la nécessité de trouver, aujourd’hui, encore plus de synergies, de travailler à l’élaboration et à la mise en œuvre d’un curriculum.

Une multitude de notions et concepts fleurissent chaque jour, d’où des difficultés à les identifier et à les référencer ; il nous faudra être vigilants à ne pas courir après tous les concepts à la fois, étudier les concepts à la mode impulsés par l’Institution, analyser les intentions. Mais en revanche continuer avec les professionnels de l’information à essaimer dans le sillon de la formation déjà inscrite dans l’histoire longue de la « culture de l’informationnelle », et en avoir une image à un temps T.

3. Représentations nationales à partir du sondage

Nous avons mené, entre la mi-juin et la fin septembre 2015, un sondage dont l’objectif était de comparer le métier de professeur documentaliste en France avec celui de nos pairs à l’étranger en termes de similitudes et de différences sur les conditions d’exercice du métier et surtout sur la situation de l’enseignement de l’information-documentation et de l’EMI (éducation aux médias et à l’information) : ses contenus, la pédagogie appliquée, et le personnel en charge de cet enseignement.

Pour réaliser notre sondage, nous avons créé un questionnaire [9] en français et en anglais, mis en ligne et expédié à tous nos contacts professionnels et associatifs à l’étranger, en leur demandant de transférer ce questionnaire à d’autres personnes également concernées.

Nos questions sur les contenus d’apprentissage s’inspirent des quatre champs proposés par le GRCDI et des notions organisatrices du curriculum de la FADBEN [10] prenant appui sur le Wikinotions [11] pour une analyse plus fine. Trois mois d’enquête donnent le reflet de la situation en octobre 2015. Ce même sondage reste en ligne : une enquête plus approfondie paraîtra prochainement.

A ce jour, nous avons eu 98 répondants (28 pays représentés) dont 61% viennent d’Europe, 18,5% d’Amérique du nord, 8% du réseau AEFE, 6% d’Asie, 3% d’Océanie et 3% d’Afrique (aucune réponse d’Amérique latine). 80% des répondants travaillent dans un établissement secondaire (35% en lycée, 25% en collège et 20% dans une cité scolaire), un peu moins de 15% en école primaire [12] et 5% dans l’enseignement supérieur ou en bibliothèque municipale. Les trois quarts des répondants sont des professeurs documentalistes ou des bibliothécaires scolaires.

L’analyse des résultats livrée ci-après compare souvent répondants anglophones et francophones, distinction qui reste très pertinente, même si tous les répondants au questionnaire en français ne viennent pas d’un pays francophone.

Le lieu et ses usages

Pour 54% des cas, le lieu s’intitule « Bibliothèque » (31%) ou « Bibliothèque scolaire » (23%). L’appellation « Centre de ressources » (Media ressource center) est utilisée dans les pays anglophones (USA, Afrique du sud et Nigéria notamment). « CDI » est utilisé en Roumanie (outre le réseau AEFE). En Inde et en Ecosse, le lieu s’intitule « Learning Center » et au Danemark, « Learning Center Pédagogique ».

Dans la majorité des cas (64%), les élèves n’ont pas d’obligation de venir travailler à la bibliothèque ou au centre de documentation.

On constate que la bibliothèque scolaire reste un lieu essentiellement dédié à la lecture (pour 94% des répondants) ainsi qu’au travail en groupe ou en autonomie et à l’emprunt de documents (pour plus de 80% des répondants).

Un peu plus des deux tiers des répondants citent des cours qui ont lieu dans la bibliothèque (plutôt des anglo-saxons : presque 80% contre moins de 54% seulement chez les répondants au questionnaire en français). La bibliothèque scolaire est d’abord considérée comme un lieu d’enseignement-apprentissage aux USA, en Australie et au Danemark [13] (100% des sondés citent un lieu de cours et de lecture).

Les personnels travaillant à la bibliothèque scolaire

Les répondants anglophones évoquent majoritairement des « professeurs documentalistes ». Au contraire, les répondants francophones, sauf la Roumanie et le Portugal (deux pays inspirés par le « modèle » français des CDI), mentionnent des bibliothécaires (sans titre de professeur), des assistants de bibliothèque ou même des enseignants de discipline qui travaillent à la bibliothèque scolaire. Parfois ces derniers sont à la fois enseignants dans leur discipline et documentalistes (au Portugal notamment). Enfin, les élèves volontaires qui travaillent pour la bibliothèque sont plus cités par les anglophones.

Sur les missions :

Les personnels de la bibliothèque scolaire assurent principalement les missions d’enseignement-apprentissage et de gestion du centre de documentation (57% des répondants). Arrivent ensuite des missions de formation plus « informelle » (51%), sous forme d’accompagnement ponctuel. Les missions de communication ne sont citées que par 14% des répondants.

Ceux qui ont répondu au questionnaire en français ont plus souvent cité les missions de gestion (près de 88% d’entre elles), alors que plus de 75% des répondants anglophones ont cité les missions d’enseignement-apprentissage.

L’analyse des résultats sur les missions plus précises des personnels ne place pas l’aspect pédagogique en premier. Le travail de gestion apparaît comme la mission prioritaire (86% des sondés).

La formation des élèves à la recherche documentaire (82% des sondés) place la mission pédagogique en 2e position, talonnée de près par les missions d’accueil et d’accompagnement des besoins des élèves (81% des sondés). L’enseignement de l’information-documentation en revanche, n’est cité que par 51% des répondants et les missions de communication par seulement 41% des sondés.

On note que les missions pédagogiques de la profession sont toujours plus citées par les répondants anglophones (USA, Australie, Danemark, Suède) que par les répondants francophones. Et au contraire, la mission de gestion de la bibliothèque arrive en tête parmi les sondés francophones (95% contre 88% chez les anglophones). Dans les pays où les missions de gestion sont prépondérantes, on note que les quelques missions pédagogiques existantes relèvent de pédagogie informelle (accompagner les besoins des élèves et les former à la recherche documentaire).

Quels enseignements-apprentissages ?

Moins des deux tiers des répondants (63%) affirment qu’il y a un enseignement de l’information-documentation ou une éducation aux médias et à l’information (EMI) dans leur établissement. Et 37% affirment qu’il n’y en a pas. Sans surprise, cet enseignement est plus répandu chez les anglophones (USA, Canada, Australie, Suède, Danemark).

Cet enseignement, bien que prévu, n’est pas forcément inscrit à l’emploi du temps des élèves. Et pour 64% des répondants, il n’a pas d’intitulé précis. Serait-ce parce qu’il s’agit d’un enseignement aux frontières floues ?

En général, l’information-documentation ou l’EMI sont le plus souvent intégrées à une discipline ou à un projet pluridisciplinaire, et dans les pays anglo-saxons inscrites dans les programmes scolaires nationaux.

Qui est chargé de cet enseignement ?

Très souvent, et partout, est précisée une collaboration entre professeur de discipline et professeur documentaliste ou bibliothécaire scolaire. Dans certains pays, c’est le professeur documentaliste ou « bibliothécaire enseignant » seul, qui est chargé de cet enseignement (USA : 64% des réponses, Danemark : 2/3, Suède : 2/3). Au contraire, en Espagne, Allemagne et Belgique, tous les enseignants sont chargés de cet enseignement, quelle que soit leur discipline.

En Espagne, les enseignants doivent développer chez leurs élèves des compétences numériques et en traitement de l’information (information management and digital skills). Mais selon deux répondants, l’un espagnol et l’autre allemand, cet enseignement n’est pas bien assuré par les professeurs de discipline, qui manquent de formation dans le domaine de l’EMI.

Enfin, en Australie et en Ecosse, en lycée, c’est parfois le professeur de TIC ou d’informatique qui est chargé de cet enseignement. Ainsi, il semblerait que dans les pays anglo-saxons (autres que les Etats-Unis), ce soit un enseignement très axé sur les compétences informatiques et numériques ; les compétences informationnelles et médiatiques seraient donc dissoutes dans l’informatique au sens général. Cette affirmation sera à confirmer lors d’une enquête plus approfondie.

Globalement, l’enseignement est surtout axé sur les processus d’information et de documentation (savoir faire une recherche d’information) et sur le recul critique sur les médias, les TIC et l’information. La connaissance des environnements informationnels et numériques est citée par moins de 40% des répondants, mais beaucoup plus par les anglophones que par les francophones. Ce qui confirme que l’enseignement est bien plus axé sur l’informatique et le numérique dans les pays anglo-saxons. Les répondants francophones ont cité en premier, loin devant les autres contenus, le fait de savoir faire une recherche documentaire (donc un contenu a priori plus axé vers l’information-documentation).

Sur les contenus plus précis de cet enseignement, les répondants citent souvent la recherche d’information (51% des répondants) et la notion de source (49%).

Finalement, ce sondage a permis de mettre en évidence les pays avec un fort taux d’enseignement de l’information-documentation et de l’EMI. Il s’agit plutôt de pays anglo-saxons : Australie, Etats-Unis, Danemark et Suède. Aux Etats-Unis, on note des usages proches des nôtres, à l’exception de l’enseignement, plus difficile à évaluer au regard des États et des établissements. En Australie, le contenu de cet enseignement correspond tout à fait à ce que propose la FADBEN avec un curriculum.
Pour conclure, nous rappelons que ce sondage est toujours en cours et pourra être affiné au fur et à mesure.

De nombreux pays ne sont pas représentés dans les réponses données aujourd’hui (notamment en Amérique latine, Asie, Afrique et le Canada, qui aurait certainement des données intéressantes à analyser...). Grâce à une veille documentaire active, nous tenterons de communiquer les résultats d’une enquête plus approfondie.

Mais dès à présent, ce sondage nous permet d’affirmer qu’au niveau international, en 2015, l’information-documentation et l’EMI sont considérées plutôt comme un enseignement transdisciplinaire porté par toutes les disciplines (comme il nous est présenté dans les nouveaux programmes de collège en France).

Sur les recommandations de l’UNESCO, et dans de nombreux pays, à l’instar de la France, cet enseignement est pris en compte dans les nouveaux curricula nationaux.

Ce sondage a permis aussi de mettre très clairement en évidence le besoin de formation des enseignants de discipline dans ce domaine. Dans certains pays où l’enseignement est plus développé, on note quand même le rôle pédagogique essentiel du bibliothécaire scolaire souvent considéré comme un spécialiste des médias (USA) et de nombreuses collaborations entre professeur documentaliste et professeur de discipline (Australie).

Enseigner-apprendre l'information-documentation : regards sur l'international de FADBEN

Notes

[1] APDEN. La FADBEN et l’IFLA [en ligne]. Disponible sur http://www.apden.org/La-FADBEN-et-l-IFLA.html (Consulté le 01.10.2015)

[2] ifla-l@infoserv.inist.fr

[3] Déclaration de Lyon sur l’accès à l’Information et au Développement. La Déclaration de Lyon d’août 2014 a été rédigée en anglais. Par conséquent, le texte anglais de la Déclaration prévaudra sur toute traduction.
L’Organisation des Nations Unies est actuellement en train de négocier un nouveau programme de développement pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Ce programme servira d’orientation à tous les pays en vue de la définition des approches à adopter pour améliorer la vie des populations et d’une nouvelle série d’objectifs à atteindre pendant la période 2016-2030.
« Nous soussignés, signataires de la présente déclaration, estimons que l’amélioration de l’accès à l’information et aux connaissances à tous les niveaux de la société, associée à la disponibilité des technologies de l’information et de la communication (TIC), contribue à favoriser le développement durable et à améliorer la vie des gens.
Nous appelons, donc, les États Membres des Nations Unies à s’engager, à l’échelle internationale, à utiliser le programme de développement post 2015, pour faire en sorte que chaque individu ait accès aux informations nécessaires en vue de la promotion du développement durable et des sociétés démocratiques et soit en mesure de comprendre, utiliser et partager ces informations. »

[4] Baltz, Claude « Une culture pour la société de l’information ? Position théorique, définition, enjeux ».in Documentaliste, Volume 35, N° 2, paru le 1 mars 1998, page(s) 75-82 - See more at : http://www.adbs.fr/une-culture-pour-la-societe-de-l-information-position-theorique-definition-enjeux-13454.htm?RH=REVUE54.htm ?

[5] Carla Basili 
Roma : Consiglio Nazionale delle Ricerche, 2003 
XIV-315 p. – (Note di bibliografia e di documentazione scientifica ; LXVI) 
ISSN 0085-2309)) (2004).

Ce modèle propose un élargissement et un enrichissement conceptuel autour de trois axes principaux : comme discipline, comme objectif politique et citoyen, comme compétence (incluant des capacités techniques mais aussi cognitives) ; le tout impliquant son inscription dans une action politique, dans un programme d’enseignement.

Une perspective disciplinaire relayée en journée d’étude de l’ADBU Documentation et pédagogie universitaire à Vannes, le 16 septembre 2011[[http://adbu.fr/documentation-et-pedagogie-universitaire-a-vannes-le-16-septembre-2011/

[6] FADBEN. Les professeurs documentalistes et les apprentissages info-documentaires [en ligne]. Disponible sur : http://apden.org/Les-professeurs-documentalistes-et.html (Consulté le 01.10.2015)

[7] FADBEN, Connaissances en information-documentation des élèves du secondaire en France [en ligne] . Disponible sur : http://apden.org/Connaissances-en-information.html (Consulté le 01.10.2015)

[8] Ernoult Martine, Cardona Nicole, Dimier, Gildas « Le rôle du professeur documentaliste dans l’enseignement de l’information et des médias en France : Perspectives de la FADBEN ». Disponible sur : http://library.ifla.org/933/1/213-ernoult-fr.pdf

[9] Enquête internationale sur l’enseignement de l’information-documentation et l’éducation aux médias. Disponible sur : http://frama.link/Questionnaire_en_francais. Enquête en anglais disponible sur : http://frama.link/Questionnaire_in_English

[10] A.P.D.E.N. Vers un curriculum en information-documentation [en ligne]. Disponible sur : http://www.apden.org/Vers-un-curriculum-en-information.html (Consulté le 01.10.2015)

[11] A.P.D.E.N. Wikinotions InfoDoc [en ligne]. Disponible sur : http://apden.org/wikinotions/index.php?title=Accueil (Consulté le 01.10.2015)].

Les résultats du sondage sont analysés selon les totaux des deux questionnaires (français et anglais), puis après compilation selon certains critères[[Pays, profession du répondant, existence ou non d’un enseignement en information-documentation et/ou d’une EMI

[12] Plus représentées dans les réponses anglophones (notamment USA et Danemark)

[13] NB : Au Danemark, les répondants travaillent en école primaire.

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