2013
déc.
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Edito Médiadoc 11

EMI et enseignement info-documentaire. Vol. 1

Un premier volume, sous forme d’état des lieux. Il se propose de questionner l’épistémologie et les contenus de ces deux champs confondus, mais distincts, que sont l’« information » et les « médias ».

Une nouvelle fois, la tension entre savoirs spécifiques et « éducation à » est ici à l’œuvre et l’on comprendra combien il est important de trouver un point d’équilibre.
Opter pour un enseignement inscrit dans un curriculum info-documentaire qui appréhende ces convergences et ces tensions, pourrait y parvenir.

EMI et enseignement info-documentaire. Vol. 1

Médiadoc 11 décembre 2013

**Edito

Gildas Dimier

La loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République (juillet 2013) entérine la création de l’Éducation aux médias et à l’Information (EMI). C’est un acte fort au regard des enjeux de citoyenneté portés par la formation des élèves, qui sont les premiers concernés par ce dispositif. Pour autant, au-delà de l’intention, essentielle, un équilibre semble devoir être trouvé, pour la réussite des élèves, dans la tension qui pourrait s’opérer entre des contenus spécifiques en (re)formation, et leur concrétisation dans le contexte particulier d’une « éducation à »... ou d’un enseignement. Une réflexion est ici à mener sur l’articulation opératoire de ces deux perspectives potentiellement complémentaires, mais qui suppose des modalités de mise en œuvre et des objectifs distincts. La ligne de faîte est ici extrêmement ténue entre, d’un côté, la prédominance d’une didactique et d’une pédagogie info-documentaire spécifiques et, de l’autre, une approche transversale dont les contours risquent d’être mal perçus par les élèves. En l’espèce, le choix qui sera fait est d’autant plus important qu’il déterminera ce « partage des eaux » dont découleront les conditions de navigation de nos élèves. Dans ce contexte, à l’heure où l’on commémore le centenaire de la naissance d’Albert Camus, les professeurs documentalistes pourraient devoir emprunter à Sisyphe, se demandant de quel côté la pierre va tomber..., ou se rappeler L’homme révolté. La FADBEN voit dans l’EMI un ancrage fort dans les sciences de l’information et de la communication (SIC), d’où sont extraits les savoirs de référence des professeurs documentalistes. La question d’un enseignement qui leur serait spécifique est alors à poser explicitement, la manière dont il est à dispenser, seul ou en responsabilité partagée, n’étant que secondaire.

Parce que la thématique retenue l’impose et parce que le nombre de contributions reçues est important, nous avons fait le choix de consacrer deux numéros de Mediadoc à l’EMI. Ce premier volume, sous forme d’état des lieux, se propose de questionner l’épistémologie et les contenus de ces deux champs confondus, mais distincts, que sont l’« information » et les « médias ». À cet égard, le pluralisme des approches, théoriques et pratiques, qu’elles émanent de la recherche ou des professionnels, atteste de la richesse des questionnements en cours et de leurs réalisations. Ces convergences et ces clivages, qu’ils aient un fondement épistémologique, qu’ils pensent la place et la relation entre « information » et « média », qu’ils portent sur les contenus à enseigner, ou qu’ils interrogent la pertinence de certains outils, sont autant de promesses d’un dialogue fécond. C’est sans doute là l’une des caractéristiques de l’émergence du numérique que de susciter des « possibles », dont l’inscription de l’EMI dans la loi est un exemple. Ce nouveau paradigme dessine de nouvelles approches dont il nous faut appréhender en conscience et avec raison les perspectives didactiques et pédagogiques, du moins si l’on souhaite donner une cohérence à l’EMI, en privilégiant la réussite des élèves.

À ce sujet, pour revenir sur ce qui pourrait constituer un cadre opératoire à un enseignement-apprentissage de l’EMI appliqué au contexte numérique, la référence au terme « littératie » nous questionne. Celui-ci apparaît régulièrement dans les contributions, qu’il se réfère à la littératie médiatique, informationnelle, numérique ou encore à la translittératie, qui recoupe des compétences info-documentaires, médiatiques et informatiques. Il nous semble que le recours à ce terme, qui renvoie à la « media information literacy » de l’UNESCO, pourrait devoir alerter les professeurs documentalistes dont les savoirs de référence se situent à la convergence de ces littératies. D’autant que celles-ci pourraient être diluées dans cet ensemble plus global qu’est la « culture numérique ». Le risque serait alors d’altérer la spécificité des savoirs abordés, au préjudice de leur compréhension par les élèves. Une nouvelle fois, la tension entre savoirs spécifiques et « éducation à » est ici à l’œuvre et l’on comprendra combien il est important de trouver un point d’équilibre. Il nous semble, à cet égard, qu’opter pour un enseignement inscrit dans un curriculum info-documentaire qui appréhende ces convergences et ces tensions, pourrait y parvenir.

J’aimerais, pour conclure, saluer le travail accompli par Ivana Ballarini-Santonocito qui pendant six ans a assuré la coordination éditoriale de Mediadoc. Pour mesurer l’investissement que cela suppose, je n’en suis que plus admiratif. Puisqu’elle quitte cette activité, du moins temporairement, j’espère en particulier parvenir à pérenniser ce lien qu’elle a su construire entre la Recherche et le Terrain. Bon vent donc... je sais que tu garderas un œil sur Mediadoc.

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Sommaire Mediadoc N°11
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